Les albums de death les plus originaux sortis au début des années 90 par TarGhost
publication le : 20/02/2015
Poivre Blanc ou Waïkiki ? Creeks ou Chevignon ? Starter ou Teddy ? Pump ou Air Jordan ? Megadrive ou Super NES ? Metallica ou Guns'n'Roses ?

Quand je me remémore certains des choix cornéliens auxquels j'ai du me soumettre au début des années 90 et à ces ruses, viles et éhontées, à l'égard de mes pauvres parents pour décrocher le Graal, je ressens une (légère) poussée de honte mêlée à un poil de culpabilité. Tout cela pour faire le beau dans la cour devant ces demoiselles en pamoison ("Ouah t'as vu Jennifer, il est trop beauuuuu son t-shirt Poivre Blaaaaaanc ! C'est un surfeur j'suis sûr !")...mais aussi pour me sentir bien au chaud au sein du groupe. Et gare à la faute de goût, au fatal faux-pas (Eh mec, c'est quoi ce logo là sur ton t-shirt ? Great White ? Allez dégaaaaaage !) synonyme d'exclusion du troupeau. Beeeeeh, beeeeeh !

Et bien figurez-vous qu'en matière de death metal, le parallèle existe : Sunlight studios ou Morrisound ? Lyrics tripaille-gore ou satanisme bon marché ? Mélodies nordiques ou trépanations ricaines ? Logo rouge sur fond noir ou noir sur fond rouge ? Demo pochette xerox ou glossy cover classieuse ? Le nombre d'options pour nos apprentis-bouchers qui s'escriment dans leur garage aux quatre coins du globe s'apparente à un vrai Rubiks cube aux multiples combinaisons. Mais l'écrasante majorité se contente de prendre le train en marche. Une demo vite fait bien fait, un air contrit sur la photo de groupe, quelques gimmicks (croix renversée et/ou pentagramme) sur le logo et zou...on balance la purée ! (Mal)heureusement, la concurrence est féroce et la durée de vie de tous ces groupes éclos au son des grands anciens varie de quelques mois à deux ou trois ans, pour les plus obstinés. Rassurez-vous, je ne vais pas me lancer dans l'inventaire bestial en y débitant les 'nièmes anecdotes sur les pourvoyeurs d'underground qu'étaient Wild Rags, Obscure Plasma ou Molon Lave, vous trouverez tout cela dans un paquet de fanzines de l'époque. Non, je vous propose aujourd'hui de braquer les spots sur cinq albums qui n'ont pas reçu l'accueil chaleureux qu'ils méritaient à leur sortie, la faute peut-être à un(e) attaché(e) de presse feignant(e) et/ou un style trop décalé pour intéresser les masses avides de tripes fumantes et autres blasts à gogo.

Concernant les critères, j'ai choisi de borner ma recherche entre 1990, année où le style a vraiment pris ses marques aux quatre coins du globe, appuyé par la sortie de chefs d'oeuvre indiscutables, et 1993, où il a amorcé sa lente descente aux enfers (quoi de plus logique après tout pour du death metal), battant en retraite sous les assauts de chemises bûcheron, casquettes siglées et autres jeans mystérieusement troués au niveau des genoux. Triste mais vrai, on ne réécrira pas l'histoire. Pour sûr, les albums que je vous propose dans ce Top 5 partagent cette même volonté de sortir des sentiers battus pour défier les lois du blast au kilomètre, du growl à la chaîne et autres déstockage de double pédale. Ils font partie de cette grande et belle famille qu'est le death metal puisqu'il faut bien les caser quelque part, mais ils proposent une relecture viscéralement différente de celle régurgitée par les cohortes de suiveurs en vogue à l'époque. Voici donc des frondeurs, vénérables avant-gardistes qui ont osé dire "non" au moment où l'unique salut résidait dans l'uniformisation galopante. Que justice leur soit rendue en cet auguste dimanche. Amen.

5 - MEATHOOK SEED "Embedded" (1993)

Un power-trio au pedigree impressionant, jugez plutôt : Trevor Peres (vocalises) et Donald tardy (batterie) temporairement échappés d'OBITUARY ainsi que Mitch Harris de NAPALM DEATH (préposé aux guitares, basse et bidouilles électronique) s'acoquinant au sein d'une formation qui leur permet de libérer un surplus d'énergie créatrice. Et les gaillards ne se font pas prier ! Trevor alterne grunts déshumanisés, hurlements de goupil et phrasés vindicatifs, loin de ses raclements de gorge habituels pendant que son compère s'aventure sur des terrains rythmiques atypiques, bien éloignés du méchant groove Obituarien. Quant à Mitch, notre Remy Bricka grand-briton chapeaute le tout consciencieusement, balançant sans sourciller ses riffs tordus et torturés, complètement hors du cadre imposé par les grandes pontes du style. Car c'est bien de cela dont il s'agit à l'écoute de cet album viscéralement death, foncièrement indus, flirtant avec le hardcore : une rupture avec les codes et conventions alors en vogue. Les trois mercenaires se plaisent à brouiller les pistes pour mieux surprendre l'auditeur en livrant leur conception du death metal, perverse et névrosée, à ne pas à mettre entre toutes les oreilles. D'autant que le sentiment de malaise est renforcé par cette production froide et clinique, des textes énigmatiques à souhait et un salmigondis de bidouillages électro qui atteint des sommets éthérés sur "Sea of tranquility", outro de presque 13 minutes navigant entre dub, electro et ambiant.
Un disque inquiétant, dérangeant, sinistre.




4 - AFFLICTED "Prodigal Sun" (1992)

Et oui, quelques temps avant le déferlement de la conscience vegan et d'une vie sans artifices ou d'autres préoccupations environnementales chères à certains groupes HxC ou post-black, le death pouvait lui aussi se prévaloir d'une conscience écolo ! Fripes colorées, chemises délavées, pommes bio et vieux pulls à mémé : bienvenue dans le monde rétro-psychédélique d'AFFLICTED !
Sorti en 1992, l'année du plein boom death metallique, ce "Prodigal Sun" tient une place à part dans la grande famille du death suédois. S'inspirant en bonne partie des enseignements du duo ENTOMBED/DISMEMBER, il opte pour une réintérpétation très personnelle qui se caractérise par une utilisation plus raisonnée des mid-tempo typiques du grand nord couplés à des parties speedées si prisées par ses homologues américains. Ajoutez à cela des parties dissonantes, une aura quasi psychédélique, l'utilisation d'instruments exotiques, des breaks complètement hallucinés et vous obtenez un grand huit frondeur et avant-gardiste qui se démarque du reste de la concurrence. Vous voulez en savoir plus ? La chronique remember de l'album "Prodigal Sun" est disponible ici pour étancher votre soif de connaissance !




3 - DISHARMONIC ORCHESTRA "Not to be undimensional conscious" (1992)

Pas facile de choisir entre les deux premières oeuvres de ce combo autrichien qui défie sans ménagement les lois du genre. J'ai cependant une légère préférence pour le second que je trouve plus abouti et barré que son prédécesseur "Expositionprophyllaxe", sorti en 1990 sur Nuclear Blast. Les plus téméraires qui oseront aventurer leurs esgourdes par ici pourront se délecter de rythmiques assez classiques en apparence mais qui prennent une dimension unique lorsque l'on s'attarde sur ces éléments dissonants qui peuvent rappeler VOIVOD, de nombreux breaks improbables qui lorgnent sur les petits copains d'ATHEIST ou cette basse incontrôlable. Le plus bluffant est de constater que cela forme une ligne artistique cohérente mais constamment chahutée sur neuf titres illuminés qui vous transporteront aux confins de la schizophrénie. Seule la production gourmande et grassouillette empruntée aux Sunlight Studios peut servir de repère rassurant tant le trio s'amuse à balader l'auditeur dans son univers dérangé et avantgardiste. Hermétique ? Vous avez dit hermétique ?




2 - CARBONIZED "For the security..." (1991)

Illustre production du mythique label Havrais Thrash Records (WOMBBATH, CONVULSE, ECXRUCIATE...), ce premier album du trio suédois CARBONIZED, composé d'1/3 d'ENTOMBED (Lars Rosenberg) et de 2/3 de THERION (Christofer Johnsson et Piotr Wavrzeniuk), constitue un monument de death/grind bizarroïde. Résolument expérimental, cet enchevêtrement de riffs a quelque chose d'aliénant, de fascinant, comme si les parties de guitares s'affranchissaient du reste de la troupe pour avancer sans se soucier du reste. La basse n'est pas en reste et ses interventions ponctuent intelligemment les structures uniques de chacun de ces dix morceaux, encore et toujours produits par le pape du gras double, Monseigneur Skogsberg, dans sa divine chapelle.
Ces vingt-huit minutes trop rapides s'apparentent donc à des montagnes russes dans lesquelles les hauts-le-coeur rythmiques titillent les cochlées en permanence, zéro stabilité, ça glisse où que l'on mette les pieds...voilà qui fait le charme de cette oeuvre sortie à contre-courant de la concurrence besogneuse. Quant à cet artwork original et inhabituel pour un groupe de death, avec son lowrider englouti par la froide grisaille banlieusarde, il met en garde l'auditeur avec précaution. Il se passe quelque chose de vraiment spécial par ici.




1-PAN.THY.MONIUM "Dawn of dreams" (1992)

Entre nous, là, comme ça, introduire son album par un morceau à tiroirs d'une durée de 22 minutes, ce qui correspond grosso modo à la durée totale des six morceaux suivants, c'est plutôt couillu non ? Si je vous dis également qu'aucun des sept morceaux n'a de titre, confirmant par la même que chacun d'entre eux constitue une pièce essentielle de ce puzzle géant, vous voilà convaincu ? Non ? Il ne vous reste alors plus qu'à faire abstraction de ce que vous avez déjà entendu en matière de death metal et de vous immerger corps et âme dans ce voyage sans retour quelques lignes plus bas. Car peu de mots peuvent décrire ce qu'il est possible de ressentir à l'écoute de ce "Dawn of dreams", je dois d'ailleurs vous avouer que je suis sec. Quoique. Tic-tac, saxophone, lead, ambiance, claviers, growls, progressif, Crimson², Swäno. Dan Swano, ce génie, ici principal instigateur d'un PAN.THY.MONIUM hors-normes. Franchement, trouver le moyen de caser du saxo donc, du violon, des nappes de claviers illuminées sur une base death metal ambitieuse qui à elle seule résume en quelques trois-quarts d'heure plusieurs années de labeur chez n'importe lequel de ses compatriotes, voilà qui a de quoi laisser rêveur. Voilà qui fait aussi, entre autres, de "Dawn of dreams" un album incontournable. Intemporel également. Indicible aussi. Qui ne vous livrera ses troublants secrets qu'au terme de dizaine ou de centaine d'écoutes acharnées...vous voilà averti.

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Commentaire
nocturnus1977
Membre enregistré
Posté le: 22/02/2015 à 18h10 - (3164)
pas mal...effectivement, des albums très déroutants à l'époque...

dnas le genre unique, mon album de death préféré est celui de Cadaver "In Pains"...essayez le titre Bypassed...très frais...



pokemonslaughter
Membre enregistré
Posté le: 22/02/2015 à 20h31 - (3165)
ouais j'aurai bien casé le cadaver aussi ! par contre meathook seed, pour moi, c'est pas du death metal, m'enfin c'est un quasi point de détail tant c'est bon !

nocturnus1977
Membre enregistré
Posté le: 23/02/2015 à 07h04 - (3166)
oui meathook...projet zarb...



torben
IP:80.215.225.209
Invité
Posté le: 23/02/2015 à 07h40 - (3167)
Je découvre PanThyMonium c'est énorme ! merci pour la découverte.
Au passage 1 groupe comme Inner Thoughts aurait eu sa place je pense. Je vous laisse découvrir ça sur youtube.

Strat
Membre enregistré
Posté le: 23/02/2015 à 10h06 - (3168)
Pour ma part The Cube de SUPURATION est également un album clé de death dans son genre quelque peu à part.

gardian666
Membre enregistré
Posté le: 23/02/2015 à 21h44 - (3169)
Plutôt bien d'accord avec le top3 !



Youpimatin
Membre enregistré
Posté le: 24/02/2015 à 09h52 - (3170)
Entièrement d'accord avec ce top. Un gars qui met Meathook Seed, Disharmonic Orchestra et Carbonized dans un TOP 5 ne peut être qu'un esthète de bon goût doublé d'un homme d'un goût sûr et raffiné



varkamahikan
Membre enregistré
Posté le: 24/02/2015 à 23h30 - (3171)
je connaissais ces albums hormis le disharmonic oschestra, merci pour la découverte c'est téléchargé ;)

le sinister slaughter de Macabre est aussi un peu barré

kra$$
IP:82.233.205.186
Invité
Posté le: 26/02/2015 à 09h01 - (3172)
Excellent TOP ! Perso j'aurais juste casé Demilich : )

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