Uriel interview RAKOTH
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Ecouter l'album " Jabberworks " de ces Russes est une expérience dont on ne se relève qu'avec peine. J'ai eu beau bien faire le tour de mes rayons ces dernières semaines, les albums à placer au même niveau d'intensité, de rayonnement, de musicalité (de tout en gros...) ne sont pas légion. Raison de plus pour balancer un petit e-mail à Rustam qui, des steppes endormies de sa Russie natale, nous donne un point de vue net et précis de la situation que vit son groupe à l'heure actuelle. Ambiance...

Bonsoir et merci d'accorder un peu de temps à répondre à ces questions. Premièrement, dis moi un peu à quoi ressemble le ciel de Russie à cette époque ?
Le temps est un peu étrange. La semaine dernière on a eu de la neige, et là il ne fait plus que pleuvoir. Un sale automne quoi.

Je ne ferais pas mystère que le nom de Rakoth est encore très peu prononcé dans les cercles metal en France, où d'ailleurs personne ne semble s'intéresser à l'existence d'une scène metal en Russie - mais il faut espérer que ça va changer. Peux-tu STP donner un aperçu de l'histoire et de la progression du groupe ?
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Je ne pense pas que notre bio ait quoi que ce soit d'inhabituel. Nous avons démarré le groupe en 1997. Depuis nous avons enregistré quelques démos, signé chez Code666 en 1999 et sorti deux albums. Récemment nous avons signé sous Elitist Productions, qui est un sub-label de Earache Records. Notre line-up est resté inchangé à l'exception de notre bassiste Den qui nous a quitté en 1998 je crois. J'imagine que c'est l'histoire banale de n'importe quel groupe. Rien de spécial.

Qu'est-ce qui a motivé le groupe pour signer à l'époque chez Code666, un label italien qui en était à ses balbutiements ? Est-ce que vous étiez irrémédiablement déçus par les infrastructures metal de votre propre pays ? D'ailleurs, quel est l'état de popularité de Rakoth en Russie à l'heure actuelle ?
Code666 ont été les premiers à nous offrir d'aussi bonnes conditions. Je ne pense pas qu'un label russe aurait pu s'aligner. Pour ce qui est de la popularité de Rakoth en Russie, je n'en ai pas la moindre idée et je m'en tape un peu. Je sais seulement que nos albums sont distribués par le label moscovite Irond Records et qu'ils se vendent pas trop mal.

En jetant un œil aux compos de votre second album " Jabberworks ", je suis un peu perplexe. En effet, la plupart ont été écrites antérieurement à l'enregistrement de votre premier album, " Planeshift ", sorti en 99. Est-ce que tu pourrais mettre un peu d'ordre là-dedans ? Les chansons de " Planeshift " étaient déjà prêtes en 95 ou quoi ?
Hein ? Non... En fait, " Jabberworks " est une sorte de compilation de nos meilleurs titres, issus de sessions d'enregistrement qui n'avaient pas eu l'honneur d'un pressage CD. Les morceaux étaient bon et nous ne voulions pas les laisser en arrière. Donc nous les avons ré-enregistrées. De plus, deux chansons sont inédites.

Le truc, c'est qu'une progression dans l'écriture des morceaux entre les deux albums est notable. Il est fait état de " lourds réarrangements " pour " Jaberworks ". Cela veut-il dire que vous pensiez à l'origine que ces morceaux n'étaient pas assez homogènes ? Peux-tu illustrer avec quelques exemples dans quelle mesure les chansons diffèrent de leur version originale ?
Hmm... Très difficile à expliquer. Je ne sais pas comment décrire ça. Tous les morceaux sonnaient bien dans leur ancienne version et maintenant ils sonnent extra. Certains ont traversé un long processus de " réarrangement ". Par exemple " Dying Realm ", " Story of the Nameless " et " Return of the Nameless " sont toutes trois présentes et sur la démo " Tales of the Worlds Unreal ", et sur la suivante " Superstatic Equilibrium ", et bien sûr sur " Jabberworks ". Toutes les versions sont différentes l'une de l'autre. La différence la plus évidente (mais pas la plus importante) sur " Jabberworks " provient de l'utilisation de l'orchestre live.

Lors de notre interview précédente, tu réfutais catégoriquement l'idée que les paroles puissent être associées à une mythologie quelconque. Est-ce pour éviter ce type d'amalgames que les textes n'ont pas été imprimés ce coup ci ? Peut-on tout de même avoir une petite idée des thèmes principaux abordés au cours de l'album ?
L'absence de lyrics dans le digipack cette fois était conceptuelle. Nous avons tout simplement eu le sentiment que ce n'était pas nécessaire. Nous ne voulions même pas des infos CD, label, etc., mais nous avons du nous y résigner pour des raisons de copyright et tout ce tralala. En fait il y aurait du n'y avoir que le titre " Jabberworks ", les titres des chansons et leur date de création, plus une citation tirée du morceau " Brightless ", point barre. Je n'expliquerai pas les lyrics cette fois. La plupart des textes de nos vieux morceaux sont présents sur le site Internet de Rakoth. Ceux qui n'y sont pas, et bien c'est qu'il y a une raison pour ça. Et les lyrics de la chanson " Der Jammerwoch " peuvent être trouvés dans le bouquin  de A. Caroll " Through the looking Glass ".

Voici venir la grande question. Votre musique échappe à toute catégorisation, mais ne sonne pas non plus comme un melting-pot de différents styles. A certains moments on aurait envie de crier " black metal ! ", dix secondes plus tard " doom " et puis déboule une tornade orchestrale magnifique. Mais ce ne sont que des indices puisque l'impression globale est celle de cohérence et d'unité. Votre bio mentionne que vous avez créé votre propre style. Etes-vous sur la même longueur d'ondes que ce discours p
Rakothcover.jpg (5766 octets)lutôt ambitieux ? Vous sentez-vous dans la peau de précurseurs ?
Non, absolument pas. Nous nous foutons royalement de coller à un style particulier ou à plusieurs styles à la fois, tout comme nous ne pensons pas à créer notre propre style. Nous nous contentons d'écrire, de jouer et de créer Après, inventer des définitions, c'est ton boulot, he he...

Ecoutes-tu beaucoup de musique toi-même ? Qu'est-ce qui a ta préférence à l'heure actuelle ? Dirais-tu que le groupe tire moins d'influences de ses écoutes que par le passé ?
Oui, j'écoute beaucoup de musique. Pour ce qui est de mes favoris, il y en a beaucoup. Un petit échantillon serait : Afflicted, Anathema, Atheist, Cocteau Twins, Cynic, Dead Can Dance, Die Form, Necromantia, Opera IX, Pan.Thy.Monium, Sadist, Siouxsie and the Banshees, Skyclad, The 3rd and the Mortal, Tsatthoggua etc... Des influences ? Et bien, je n'en vois pas particulièrement, mais tu sais, nous-même ne savons pas avec certitude ce qu'il en est. Ceci dit je vois mal comment, par exemple, Die Form aurait pu avoir influencé la musique de Rakoth.

Comment s'est déroulée la collaboration avec le " Grotesque " Orchestra de Russie ? Avez-vous d'abord enregistré les instruments classiques pour les implanter par la suite sur le squelette metal, ou bien est-ce le contraire ? Quel a été le degré d'implication de ces musiciens externes ?
L'enregistrement a été mixte. Avant tout le " squelette-midi " a été enregistré, puis l'orchestre est venu par sections (cordes hautes, cordes basses, cuivres) et a joué en adéquation avec ces parties " midi " et sous ma direction, puis nous avons enregistré le tout. Nous avons enregistré les instruments metal dans un temps réduit entre deux sessions orchestrales. Les musiciens étaient des professionnels, ils ont même offert d'améliorer les parties. Tous leurs conseils ont été les bienvenus. Ce fut un plaisir de travailler avec eux.

Il est clair que ces passages symphoniques sonnent bien plus authentiques que si vous aviez utilisé de simples synthés pour reproduire les nuances. Chercherez-vous à poussez cette osmose plus loin ? Y a-t-il une chance de vous voir vous lancer dans un véritable metal-opera où l'orchestre serait ancré encore plus profondément dans les chansons ?
Aucune idée. J'ignore même si nous retravaillerons avec l'orchestre à l'avenir, ou bien si nous laisserons tomber carrément tout ça. On verra bien comment ça va se passer. Mais je ne suis pas tout à fait d'accord sur ta remarque au sujet des synthés. Peut-être qu'ils sonnent moins " réalistes ", mais ils peuvent donner un résultat génial et unique. Regarde Hollenthon - parfois ils alternent des samples de musique classique orchestrale avec des effets purement électroniques, comme du " groove delay " (NdJ : un  technicien au secours !). C'est vraiment époustouflant. (NdJ : D'une je n'aime que moyennement le dernier Hollenthon, de deux je ne pensais pas à des samples mais simplement à jouer les mélodies au synthé avec diverses sonorités)

Pour conclure cet album il y a ce titre " Der Jammerwoch ", dont la structure contient des racines encore plus excentriques, comme des délires  vocaux ou le petit bœuf jazzy vers la fin. Quel est le but derrière cette chanson ? En la mettant à la fin de l'album, comptez-vous donner une indication de la direction dans laquelle le groupe va évoluer ?
Non, nous n'avons aucune idée de la direction dans laquelle notre musique va évoluer. Mettre cette chanson particulière à la fin avait bien un certain objectif, mais je ne le révèlerai pas, he he...

Avez-vous des plans de tournée concrets dans un futur proche ou plus lointain ? A quoi ressemblerait une performance live de Rakoth ?
Si nous décidions de tourner ou juste de faire des concerts à droite et à gauche, nous nous débrouillerions pour faire un show approprié - P. Noir (chant) est directeur artistique de théâtre (pour l'instant il termine des études dans ce sens). Mais pour l'heure nous ne jouons pas sur scène et ne projetons pas encore de le faire. Peut-être que cela changera à l'avenir.

Bien... Je viens d'apprendre que vous aviez signé un deal avec Earache, et que vous alliez inaugurer, conjointement avec vos anciens compagnons de label Ephel Duath, leur nouvelle subdivision. Je suppose que ceci est ressenti comme une sorte de promotion et de reconnaissance de vos efforts. Comment se sont déroulées les négociations ? Ne craignez-vous pas que Earache mette plus de pression sur le groupe au niveau des délais studio, des obligations promotionnelles, etc. ?
Non. Je négocie directement avec Lee Barret, le boss d'Elitist. Il nous laisse toute liberté d'action en ce qui concerne notre musique, etc.

L'artwork de " Jabberworks " a été conçu par Mauro du groupe italien Canaan. Peux-tu jeter la lumière sur sa signification ? D'autre part, es-tu familier avec la musique de Canaan ?
Avant tout il y a un petit malentendu qu'il faut clarifier. L'ensemble de l'artwork (y compris les photos) a été réalisé par notre artiste maison Den (notre ex-bassiste). Mauro s'est seulement chargé du travail infographique afin d'adapter l'artwork au format digipack. Par contre, Mauro est à créditer pour l'artwork de notre précédent album " Planeshift ". J'imagine qu'il avait été embauché par Emiliano, le manager de Code666. Et non, je ne connais pas la musique de Canaan.

La popularité du groupe doit pas mal à l'Internet, les mp3 et ce genre de choses. D'autre part votre website est assez sophistiqué (tellement sophistiqué en fait qu'il a fait rendre l'âme à mon navigateur). Es-tu toi-même un fana de la toile ? Essaies-tu de rester en contact à travers le Net avec de petits artistes individuels, tels que Rakoth l'était au tout début ?
Je ne me définirais pas vraiment comme un " fana " de l'Internet. C'est vrai je m'en sers beaucoup et je trouve que c'est un outil de communication extrêmement utile. Et bien sûr ça a énormément aidé au développement de Rakoth. Mais ce n'est pas davantage qu'un outil de toute façon. Oui, je communique avec de nombreux artistes, petits ou moins petits.

OK, il est l'heure de refermer cette interview. Je te laisse avec ce que tu as à dire à nos lecteurs. Et puis, fais-moi une faveur et coclus le tout avec une citation tirée de " Jabberworks " qui a une importance empirique à tes yeux.
He he... OK, voici la citation appropriée : " Predstavte sebe! " (du morceau " Der Jammerwoch "). Adieu et merci. (NdJ : Tu voulais pas me la mettre en cyrillique tant que tu y étais ???)